La Chine ordonne aux gouvernements locaux de réduire leur exposition aux projets des secteurs public et privé alors que les risques d’endettement augmentent, selon des sources

La Chine a ordonné à ses gouvernements locaux d’arrêter les projets PPP identifiés comme « problématiques » et a remplacé une allocation budgétaire de 10 % pour ces projets par un mécanisme de sélection mis en place par Pékin dans le but de limiter les risques d’endettement municipal.

Les lignes directrices figuraient dans un document du Cabinet distribué le mois dernier aux gouvernements locaux, aux banques politiques et aux prêteurs gouvernementaux, ont indiqué les deux sources proches du dossier. Les lignes directrices les plus récentes n’ont pas été publiées auparavant.

Le Conseil d’État a publié des lignes directrices détaillées pour réformer le modèle PPP pour la première fois depuis son lancement en 2014, et cela intervient alors que les inquiétudes grandissent quant à l’impact de la montée en flèche de la dette des gouvernements locaux sur l’économie.

La dette des gouvernements locaux a atteint 92 000 milliards de yuans (12 600 milliards de dollars), soit 76 % de la production économique chinoise en 2022, contre 62,2 % en 2019, selon les dernières données du Fonds monétaire international.

Pour tenter de limiter l’accumulation d’une dette supplémentaire, Pékin supprimera une réglementation autorisant les gouvernements locaux à allouer jusqu’à 10 % de leurs dépenses annuelles du budget général à ces projets, ont indiqué les sources.

La limite de dépenses de 10 % sera désormais remplacée par les autorités gouvernementales examinant chaque projet PPP, ont-ils indiqué. Cette décision intervient après que les dépenses de nombreuses collectivités locales sur la base de partenariats public-privé ont atteint la limite supérieure du seuil ces dernières années.

Le Conseil des Affaires d’Etat a également demandé aux gouvernements locaux d’arrêter les « projets problématiques », identifiés lors des inspections menées par le Bureau national d’audit plus tôt cette année, et de résoudre les problèmes identifiés, ont indiqué les sources.

Les projets classés comme « problématiques » sont ceux entachés d’irrégularités, notamment lorsque les véhicules de financement du gouvernement local (LGFV) prétendent être le partenaire « privé », conduisant à une accumulation excessive de dettes, a indiqué l’une des sources.

Les deux sources, ayant directement connaissance du document du Conseil d’Etat, ont indiqué qu’en plus de ces mesures, tous les projets PPP qui n’auront pas terminé le processus d’appel d’offres pour trouver des partenaires d’ici février de cette année seront suspendus.

Depuis 2014, Pékin promeut un modèle de partenariat public-privé pour canaliser les fonds privés vers des projets d’infrastructures publiques, afin d’augmenter les investissements en capital tout en allégeant le fardeau des gouvernements locaux criblés de dettes.

Mais le boom des PPP a alarmé les autorités, qui affirment que certaines collectivités locales ont utilisé les PPP, les fonds d’investissement publics et les services de passation des marchés publics comme des « canaux déguisés » pour contracter des dettes.

Les deux sources ont refusé de publier leurs noms en raison du caractère sensible du sujet.

Ni le Conseil d’État ni le National Accountability Office n’ont immédiatement répondu aux demandes de commentaires de Reuters.

Limiter les risques

Les économistes affirment que les gouvernements locaux lourdement endettés constituent un risque majeur pour l’économie et la stabilité financière de la Chine, dans un contexte d’aggravation de la crise immobilière, d’années de surinvestissement dans les infrastructures et d’énormes factures pour contenir la pandémie de Covid-19.

Une partie des 12 600 milliards de dollars de dette des gouvernements locaux est liée à des projets de partenariat public-privé, les municipalités ayant utilisé ces initiatives de construction d’infrastructures comme canal pour lever des capitaux.

Fin 2022, la Chine avait mis en œuvre plus de 14 000 projets PPP pour une valeur d’investissement de 20 900 milliards de yuans (2 870 milliards de dollars), soit à peu près la taille de l’économie française, selon une note de recherche de la Banque de Chine.

Pékin intensifie désormais ses efforts pour réduire les risques économiques plus larges posés par la dette des gouvernements locaux.

Reuters a rapporté le mois dernier, citant des sources proches du dossier, que la Chine avait demandé aux banques publiques de reconduire la dette existante des gouvernements locaux avec des prêts à long terme à des taux d’intérêt plus bas.

La Commission nationale du développement et de la réforme, l’organisme responsable de la planification, et le ministère des Finances ont publié la semaine dernière des règles visant à encourager les entreprises du secteur privé à investir dans des programmes de partenariat public-privé et à leur permettre d’obtenir des participations majoritaires dans certains de ces projets.

Le document du Conseil d’Etat indique que la supervision des projets PPP, tels que l’examen des évaluations du retour sur investissement et les tests de résistance financière, sera transférée du ministère des Finances à la Commission nationale du développement et de la réforme, selon les sources.

Le ministère des Finances et la Commission nationale du développement et de la réforme n’ont pas répondu à une demande de commentaires de Reuters.

Les gouvernements locaux sont tenus de déclarer tous les projets de PPP au Conseil d’État et à la Commission nationale du développement et de la réforme d’ici novembre, a indiqué la première source, ajoutant que les municipalités sont encouragées à émettre des obligations à usage spécial ou des obligations générales pour rembourser les dettes associées aux projets.

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