La France a renvoyé 15 femmes et 32 enfants détenus dans un camp de détention pour djihadistes présumés en Syrie, a annoncé mardi le ministère français des Affaires étrangères, lors du troisième grand retour de ressortissants français du pays.
Depuis des années, des groupes de défense des droits de l’homme font pression sur la France pour qu’elle reprenne les femmes et les enfants des combattants présumés de l’État islamique détenus dans des camps, depuis que le mouvement djihadiste a été évincé de son « califat » autoproclamé en 2019.
Mais le gouvernement a refusé un rapatriement général, affirmant que le retour de membres de la famille de l’EI potentiellement radicalisés poserait des risques pour la sécurité en France, qui a connu une vague d’attaques djihadistes depuis 2015.
Au lieu de cela, a-t-il dit, des cas individuels seraient examinés, ce qui a conduit au premier rapatriement massif de 16 mères et 35 enfants de Syrie en juillet 2022, et de 55 autres en octobre.
Et les femmes et les enfants sont rentrés en France, mardi, dans le camp de Roj, dans le nord-est de la Syrie, sous administration kurde, près des frontières turque et irakienne.
Le ministère des Affaires étrangères a déclaré qu’elles ont été placées au Département des services sociaux et que les mères seront traduites devant les autorités judiciaires, remerciant « l’administration locale du nord-est de la Syrie pour sa coopération qui a rendu ce processus possible ».
L’avocate Marie Doss, qui représente des proches de détenus détenus dans plusieurs camps en Syrie, a déclaré que 150 femmes et enfants français vivaient dans ces camps avant le transfert de mardi.
Contacté par l’AFP, le ministère français des Affaires étrangères a refusé de dire combien de femmes et d’enfants pourraient être renvoyés.
– ‘Il faut le ramener’ –
L’opération de mardi intervient après que le Comité des Nations Unies contre la torture a déclaré la semaine dernière que la France, en refusant de renvoyer des femmes et des mineurs de Syrie, violait la Convention des Nations Unies contre la torture et les traitements cruels, inhumains ou dégradants.
Dans une copie d’un jugement en date du 16 novembre 2022, auquel Doss a participé, la commission a déclaré que « le fait de ne pas prendre toutes les mesures raisonnables en son pouvoir pour rapatrier les proches des plaignants constituerait une violation par un État membre des articles 2 et 16 du Traité.
Des familles françaises ont été détenues dans les camps de Roj et al-Hol en territoire tenu par les Kurdes.
Des groupes de défense des droits de l’homme ont dénoncé les conditions sanitaires épouvantables, la malnutrition et la surpopulation dans le camp d’Al-Hol notamment.
Doss a déclaré que les derniers arrivants montraient que « la France a été et sera toujours en mesure de ramener les enfants et leurs mères à la maison ».
« Il reste encore des orphelins et de nombreuses mères demandent à être renvoyées avec leurs enfants, dont une femme handicapée », a-t-elle déclaré, sans donner de chiffre.
Martin Bradel, un autre avocat représentant les proches des enfants français dans les camps, a déclaré qu' »un très grand nombre d’enfants » n’avaient pas encore été renvoyés « malgré la condamnation de leur pays » pour les avoir abandonnés.
« Il neige en Syrie. Certains enfants dorment dans des tentes », a-t-il déclaré. Tous doivent être ramenés de toute urgence. »
– ‘Partager le fardeau’ –
Au cours de la dernière décennie, des milliers d’extrémistes en Europe se sont rendus en Syrie pour devenir des combattants de l’Etat islamique, emmenant souvent leurs familles vivre dans le « califat » établi dans les territoires capturés en Irak et en Syrie.
Depuis que les rebelles ont été vaincus par les forces kurdes soutenues par les États-Unis en 2019, le retour des membres de la famille des combattants présumés qui ont été capturés ou tués est une question épineuse pour les pays occidentaux.
Plusieurs pays européens, comme la Belgique, l’Allemagne et les Pays-Bas, ont repris nombre de leurs citoyens des camps syriens.
En septembre de l’année dernière, le commandant du Commandement central des forces armées américaines a exhorté les pays à rapatrier les citoyens du camp d’Al-Hol, qui abrite environ 55 000 personnes, principalement des femmes et des enfants.
Mais la France s’est montrée plus réticente, malgré la condamnation en septembre par la Cour européenne des droits de l’homme pour avoir refusé de renvoyer deux femmes détenues en Syrie, invoquant des menaces à la sécurité et aux soins de santé dans des camps dirigés par des Kurdes qui mettent leur vie en danger.
De nombreuses femmes renvoyées en France ont été inculpées d’infractions terroristes et incarcérées.
Un porte-parole des autorités kurdes du nord-est de la Syrie a déclaré mardi à l’AFP que l’administration semi-autonome « est toujours prête à coopérer avec les pays ayant des citoyens à l’intérieur des camps de Roj et d’Al-Hol, mais il a déclaré que la coopération était jusqu’ici « limitée ». . .
« Nous espérons que la communauté internationale partagera ce fardeau avec nous, car ce n’est pas seulement notre responsabilité », a-t-il déclaré.
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